MyPrépaDalloz
0

Votre panier

Votre panier est vide.

ANNALE DU CRFPA : NOTE DE SYNTHÈSE

  • : 5 heures
  • : 3
  • : 19CRFPA-NS1
  • Télécharger la version PDF
  • : Rappel des recommandations de la Commission Nationale à destination des jurys et des correcteurs d'épreuve, relativement à l'épreuve d'admissibilité de "Note de synthèse rédigée en cinq heures" (article 5-1° de l'arrêté du 17 octobre 2016) : Le dossier documentaire peut comprendre des documents divers (articles de doctrine, textes normatifs, arrêts, articles de presse, extraits d'ouvrages, cette énumération étant purement indicative). Le dossier ne devrait pas dépasser pas 20 documents et 30 pages, sans que ces limites soient impératives. L'épreuve est destinée à apprécier, notamment, les capacités de synthèse du candidat : la limite de quatre pages ne doit pas être dépassée. La qualité rédactionnelle est prise en compte (déficiences orthographiques ef syntaxiques, impropriétés de termes, inélégance de style, obstacles divers à la lisibilité du texte sont sanctionnés). Un plan apparent (avec des titres concis), dont la structuration est laissée à la libre appréciation du candidat, s'il n'est pas obligatoire, est fortement recommandé. La note de synthèse doit consister en une synthèse objective des éléments du dossier documentaire, et seules les informations contenues dans le dossier peuvent être utilisées. La référence au numéro du document peut s'avérer nécessaire à la bonne compréhension de la synthèse et est recommandée. Une brève introduction est possible mais non obligatoire, une conclusion n'est pas nécessaire.

À partir des documents joints, vous établirez une note de synthèse sur le sujet suivant :

L’IMPRESCRIPTIBILITÉ À L’ÉPREUVE DES DROITS FONDAMENTAUX

Document 1 : Extraits de la décision du Conseil constitutionnel n°2018-738 QPC du 11 octobre 2018

Document 2 : Extraits (sans notes de bas de page) de l’ouvrage de Monsieur Jérôme François, Les obligations — Régime général, Traité de droit civil, Ch. Larroumet (dir.), 4è éd., 2017, p. 151ets.

Document 3 : Arrêt de la Cour de cassation, première chambre civile, 13 février 2019, n° de pourvoi : 18-13.748

Document 4 : Extraits (sans notes de bas de page) de l’article de Monsieur Jean-Christophe Galloux, L’ordonnance du 9 mai 2018 et le décret du 31 mai 2018 relatifs au brevet européen à effet unitaire et à la juridiction unifiée du brevet, Recueil Dalloz 2018, p. 1276

Document 5 : Projet de loi PACTE, modifié par le Sénat, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 février 2019

Document 6 : Arrêt de la Cour d’appel de Paris, pôle 5, ch. 6, 19 décembre 2018, n° 16/25325

Document 7 : Extrait d’un article du journal « Courrier International », 30 octobre 2018, « Les agressions sexuelles sur mineurs bientôt imprescriptibles ? », relatant un article du journal madrilène El Pais

Document 8 : Article 2227 du Code civil

Document 9 : Extraits de la décision du Conseil constitutionnel n° 98-408 DC du 22 janvier 1999

Document 10 : Décision du Conseil constitutionnel n° 2018-743 QPC du 26 octobre 2018

Document 11 : Extraits du Rapport dit « Savoy-Sarr », intitulé « La restitution du patrimoine culturel africain »

Document 12 : Extraits (sans notes de bas de page) de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme – Grande chambre 17 mai 2010, n° 36376/04, Kononov c/ Lettonie, accompagnés de l’opinion concordante commune aux juges Rozakis, Tulkens, Spielmann et Jebens

Document 13 : Arrêt de la Cour de cassation, première chambre civile, 7 octobre 2015, n° de
pourvoi : 14-14.702

Document 14 : Observations de Monsieur Ghislain Poissonnier, sous Tribunal d’instance de Montluçon, 4 juillet 2018, Recueil Dalloz 2018, p. 1485

Document 15 : Extraits (sans notes de bas de page) de l’étude de Monsieur Laurent Griffon- Yarza, Prescription pénale – Aspects pratiques de la réforme de la prescription pénale, Droit pénal n° 5, Mai 2017, dossier 2

Document 16 : Motion sur la réforme de la prescription pénale, L’Union des Jeunes Avocats de Paris, le 23 novembre 2016

Document 17 : Extraits (sans notes de bas de page) de l’ouvrage de Madame Michèle-Laure Rassat, Traité de procédure pénale, 3è éd., 2001, n° 297

Document 18 : Extraits de l’ouvrage de Beccaria, Des délits et des peines, 1764, Traduit par M. Chaillou de Lisy

Document 19 : Proposition de loi n° 230, 27 septembre 2007, résumé, Dalloz actualité 10
octobre 2007

Document 20 : Arrêt de la Cour de cassation, troisième chambre civile, 12 octobre 2011, n° de
pourvoi : 11-40.055

Document 21 : Observations de Monsieur Remy Libchaber (extraits), sous Cour de cassation,

Chambre commerciale, 6 juin 2018, n° 17-10.103, Revue des contrats 2018, p. 548 (sans notes de bas de page)

DOCUMENT 1 : Extraits de la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-738 QPC du
11 octobre 2018

(..) LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l’occasion duquel elle a été posée. Dès lors, le Conseil constitutionnel est saisi des articles 22, 23 et 24 de la loi du 31 décembre 1971 mentionnée ci-dessus, dans leur rédaction résultant de la loi du 11 février 2004 mentionnée ci-dessus.

L’article 22 de la loi du 31 décembre 1971, dans cette rédaction, prévoit :

« Un conseil de discipline institué dans le ressort de chaque cour d’appel connaît des infractions et fautes commises par les avocats relevant des barreaux qui s’y trouvent établis.

« Toutefois, le Conseil de l’ordre du barreau de Paris siégeant comme conseil de discipline connaît des infractions et fautes commises par les avocats qui y sont inscrits.

« L’instance disciplinaire compétente en application des alinéas qui précèdent connaît également des infractions et fautes commises par un ancien avocat, dès lors qu’à l’époque des faits il était inscrit au tableau ou sur la liste des avocats honoraires de l’un des barreaux établis dans le ressort de l’instance disciplinaire ».

L’article 23 de la même loi, dans la même rédaction, prévoit : « L’instance disciplinaire compétente en application de l’article 22 est saisie par le procureur général près la cour d’appel dans le ressort de laquelle elle est instituée ou le bâtonnier dont relève l’avocat mis en cause.

« Ne peut siéger au sein de la formation de jugement l’ancien bâtonnier qui, au titre de ses fonctions antérieures, a engagé la poursuite disciplinaire.

« L’instance disciplinaire statue par décision motivée, après instruction contradictoire. Le conseil de l’ordre dont relève l’avocat poursuivi désigne l’un de ses membres pour procéder à l’instruction contradictoire de l’affaire. Ce dernier, s’il est membre titulaire ou suppléant de l’instance disciplinaire, ne peut siéger au sein de la formation de jugement réunie pour la même affaire.

« Sa décision peut être déférée à la cour d’appel par l’avocat intéressé, le bâtonnier dont il relève ou le procureur général ».

L’article 24 de la même loi, dans la même rédaction, prévoit :

« Lorsque l’urgence ou la protection du public l’exigent, le conseil de l’ordre peut, à la demande du procureur général ou du bâtonnier, suspendre provisoirement de ses fonctions l’avocat qui en relève lorsque ce dernier fait l’objet d’une poursuite pénale ou disciplinaire. Cette mesure ne peut excéder une durée de quatre mois, renouvelable.

« Les membres du conseil de l’ordre, membres titulaires ou suppléants du conseil de discipline ou de la formation disciplinaire visée à l’article 22-2, ne peuvent siéger au sein du conseil de l’ordre ou de la formation disciplinaire susvisée lorsqu’ils se prononcent en application du présent article.

« Le conseil de l’ordre peut, dans les mêmes conditions, ou à la requête de l’intéressé, mettre fin à cette suspension, hors le cas où la mesure a été ordonnée par la cour d’appel qui demeure
compétente.

« La suspension provisoire cesse de plein droit dès que les actions pénale et disciplinaire sont éteintes.

« Les décisions prises en application du présent article peuvent être déférées à la cour d’appel par l’avocat intéressé, le bâtonnier dont il relève ou le procureur général ».

Le requérant reproche aux dispositions contestées de ne pas enfermer dans un délai de prescription l’action disciplinaire susceptible d’être engagée à l’encontre d’un avocat. Il en résulterait une rupture d’égalité inconstitutionnelle avec les autres professions judiciaires ou juridiques réglementées pour lesquelles la loi prévoit un tel délai. Le requérant fait en outre valoir, avec l’intervenant, que cette absence de tout délai de prescription en matière
disciplinaire porterait également atteinte aux droits de la défense ainsi qu’à la sécurité juridique et au droit à la sûreté.

Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le premier alinéa de l’article 23 de la loi du 31 décembre 1971.

Aux termes de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». Le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui
l’établit.

Selon l’article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». Il en résulte que doit être assuré le respect des droits de la défense qui implique en particulier l’existence d’une procédure juste et équitable garantissant l’équilibre des droits des parties.

En vertu du premier alinéa de l’article 23 de la loi du 31 décembre 1971, un avocat ayant manqué à ses devoirs peut être poursuivi devant le conseil de discipline dont il relève par son bâtonnier ou le procureur général près la cour d’appel. Ni ces dispositions ni aucune autre disposition législative n’enferment dans un délai déterminé l’exercice de l’action disciplinaire.

En premier lieu, d’une part, la faculté reconnue au procureur général ou au bâtonnier, par les dispositions contestées, de poursuivre un avocat devant le conseil de discipline, quel que soit le temps écoulé depuis la commission de la faute ou sa découverte ne méconnaît pas, en elle- même, les droits de la défense. Le grief tiré de leur méconnaissance doit être écarté.

D’autre part, si les exigences constitutionnelles qui découlent de l’article 8 de la Déclaration de 1789, impliquent que le temps écoulé entre la faute et la condamnation puisse être pris en compte dans la détermination de la sanction, aucun droit ou liberté que la Constitution garantit n’impose que les poursuites disciplinaires soient nécessairement soumises à une règle de prescription, qu’il est loisible au législateur d’instaurer.

En deuxième lieu, la profession d’avocat n’est pas placée, au regard du droit disciplinaire, dans la même situation que les autres professions juridiques ou judiciaires réglementées. Dès lors, la différence de traitement instaurée par les dispositions contestées entre les avocats et les membres des professions judiciaires ou juridiques réglementées dont le régime disciplinaire est soumis à des règles de prescription repose sur une différence de situation. En outre, elle est en rapport avec l’objet de la loi. Le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi doit donc être écarté.

Il résulte de tout ce qui précède que le premier alinéa de l’article 23 de la loi du 31 décembre 1971, qui ne méconnaît pas non plus les autres exigences constitutionnelles découlant de l’article 16 de la Déclaration de 1789 ou le droit à la sûreté, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, est conforme à la Constitution.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er. – Le premier alinéa de l’article 23 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, dans sa rédaction résultant de la loi
n° 2004-130 du 11 février 2004 réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques, des experts judiciaires, des conseils en propriété industrielle et des experts en ventes aux enchères publiques, est conforme à la Constitution.

Article 2. – Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

DOCUMENT 2 : Extrait (sans notes de bas de page) de l’ouvrage de Monsieur Jérôme François, Les obligations — Régime général, Traité de droit civil, Ch. Larroumet (dir.), 4° éd., 2017, p. 151ets.

En présentant au corps législatif le projet du titre du Code civil relatif à la prescription, Bigot de Préameneu avait déclaré : « de toutes les institutions du droit civil, la prescription est la plus nécessaire à l’ordre social ». Définie par l’ancien article 2219 C. civ. comme « un moyen d’acquérir ou de se libérer par un certain laps de temps », elle était régie, dans ses deux composantes acquisitive et libératoire, par le titre XX du Livre III du Code civil. À l’occasion de la réforme de la matière, réalisée par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, le législateur a choisi de traiter distinctement la prescription acquisitive et la prescription libératoire ou extinctive. La première est définie comme « un moyen d’acquérir un bien ou un droit par l’effet de la possession » (art. 2258) et elle relève désormais du titre XXI. Le titre XX régit exclusivement la seconde, définie comme le « mode d’extinction d’un droit résultant de l’inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps » (art. 2219 C. civ.). À la base, la prescription a pour effet de consolider les situations de fait qui ont duré un certain temps en pérennisant le statu quo. En d’autres termes, elle est un facteur de sécurité juridique. Elle l’est pour le possesseur qui devient propriétaire par l’effet de la prescription acquisitive comme pour le débiteur contre lequel le créancier ne pourra plus exercer de poursuites en raison de l’écoulement du délai de la prescription extinctive.

Néanmoins, sous ce dernier aspect, la prescription pourrait être perçue comme une règle injuste, spoliatrice des intérêts du créancier. Cette objection tombe si l’on se place du point de vue de l’intérêt général. La prescription extinctive est garante de l’ordre social, que les
réclamations tardives de créanciers négligents troubleraient davantage que l’extinction de leurs droits.

DOCUMENT 3 : Arrêt de la Cour de cassation, première chambre civile, 13 février 2019, n° de pourvoi : 18-13.748

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 18 janvier 2018), que l’État a présenté une action en revendication relative à une pierre sculptée de 1,63 mètre, désignée comme le « fragment à l’Aigle », provenant du jubé gothique de la cathédrale de Chartres et acquise en 2002 par la
société Brimo de Laroussilhe (la société Brimo) ; (…)

Sur les deuxième et troisième branches du second moyen :

Attendu que la société Brimo fait grief à l’arrêt de lui ordonner de restituer à l’État le fragment du jubé de la cathédrale de Chartres dit le « fragment à l’Aigle » dans les trois mois de la signification du jugement, et de rejeter sa demande en indemnisation pour procédure abusive, alors, selon le moyen :

1°/ que la règle « en fait de meubles, la possession vaut titre » prévue par l’article 2276 du code civil constitue Un mode autonome d’acquisition, distinct de l’aliénation et de la prescription ; que dès lors, les principes d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité du domaine public ne font pas obstacle à l’acquisition d’un bien mobilier appartenant au domaine public par une prise de possession de bonne foi ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté, par motifs adoptés, « que la société Brimo de Laroussilhe est entrée en possession du fragment
revendiqué en toute bonne foi, suite à une acquisition sur le marché de l’art et qu’elle bénéficie de la présomption prévue à l’article 2276 du code civil » ; qu’en jugeant néanmoins que le fait que le bien ait appartenu au domaine public lors de cette prise de possession impliquerait, en application des principes d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité du domaine public, qu’il doive être restitué à l’État, la cour d’appel a violé l’article 2276 du code civil, ensemble l’article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;

2°/ que le fait, pour l’État, de retirer à une personne un meuble corporel qu’elle avait acquis de bonne foi constitue une privation de propriété, au sens de l’article 1er du premier protocole additionnel de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés
fondamentales, dès lors que cet acquéreur pouvait légitimement se prévaloir d’une situation de sécurité juridique résultant de son titre de propriété ; qu’une telle ingérence dans le droit au respect des biens ne peut être justifiée par l’appartenance dudit bien au domaine public que si elle est proportionnée : qu’en l’espèce, en ordonnant à la société Brimo de restituer à l’État, sans la moindre indemnisation, le fragment à l’Aigle qu’elle avait acquis de bonne foi et qui avait une valeur pécuniaire considérable, motif pris de son appartenance au domaine publie, la cour d’appel a porté une atteinte disproportionnée au droit au respect des biens de cette société, en violation de l’article 1er du premier protocole additionnel de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;:

Mais attendu, d’abord, que la protection du domaine public mobilier impose qu’il soit dérogé à l’article 2279, devenu 2276 du code civil ; qu’après avoir comparé le fragment à l’Aigle et une autre sculpture composant, ensemble, un bas-relief du jubé de la cathédrale de Chartres, démonté en 1763, l’arrêt retient que ce fragment correspond à celui extrait en 1848 du sol de la cathédrale par l’architecte M…, à une époque où le bâtiment relevait du domaine public de l’État ; que la cour d’appel n’a pu qu’en déduire que le fragment à l’Aigle avait intégré à cette date le domaine public mobilier ;

Attendu, ensuite, que l’action en revendication d’un tel bien relève de l’article Ter du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales dès lors qu’elle s’exerce à l’égard d’une personne qui, ayant acquis ce bien de bonne foi, pouvait nourrir une espérance légitime de le conserver ou d’obtenir une contrepartie ;

Attendu, cependant, que l’ingérence que constituent l’inaliénabilité du bien et l’imprescriptibilité de l’action en revendication est prévue à l’article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006 relative à la partie législative du même code ; qu’il s’en déduit qu’aucun droit de propriété sur un bien appartenant au domaine public ne peut être valablement constitué au profit de tiers et que ce bien ne peut faire l’objet d’une prescription acquisitive en application de l’article 2276 du code civil au profit de ses possesseurs successifs, même de bonne foi ; que ces dispositions législatives présentent l’accessibilité, la clarté et la prévisibilité requises par la Convention ;

 Attendu que cette ingérence poursuit un but légitime, au sens de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, dès lors que la protection de l’intégrité du domaine public relève de l’intérêt général ;

Et attendu que l’action en revendication étant la seule mesure de nature à permettre à l’État de recouvrer la plénitude de son droit de propriété, l’ingérence ne saurait être disproportionnée eu égard au but légitime poursuivi ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

DOCUMENT 4 : Extraits {sans notes de bas de page) de l’article de Monsieur Jean-
Christophe Galloux, L’ordonnance du 9 mai 2018 et le décret du 31 mai 2018 relatifs au brevet européen à effet unitaire et à la juridiction unifiée du brevet, Recueil Dalloz 2018, p. 1276

Prise en application de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, cette ordonnance met en œuvre l’Accord sur une juridiction unifiée du brevet (JUB), signé à Bruxelles le 19 février 2013 et assure la compatibilité de la législation avec les deux règlements de l’Union du 17 décembre 2012, n° 1257/2012 et n° 1260/2012, adoptés à l’issue d’une procédure de coopération renforcée entre États membres dans le domaine de la création d’une protection unitaire conférée par un brevet ; ces trois textes forment le « paquet brevet »

()

Un nouvel article L. 615-8-1 répond aux vœux des praticiens : « L’action en nullité de brevet est imprescriptible ». Ainsi, la jurisprudence actuelle se trouve-t-elle renversée, qui applique la prescription quinquennale de l’article 2224 du code civil. Il ne faut pas trop vite crier victoire. D’abord, le nouvel article reste sans effet sur une prescription déjà acquise : elle s’applique aux actions pour lesquelles, à la date de son entrée en vigueur, le délai de prescription n’est pas encore arrivé à expiration (art. 21 de l’ord.). Ensuite, l’adoption de cette disposition confirme a contrario que, jusqu’à l’entrée en vigueur de l’Accord, l’action en nullité se prescrit bien selon le délai de l’article 2224 du code civil. Enfin, il est permis de regretter que ces modifications n’aient pas touché les autres droits de propriété intellectuelle dont l’action en nullité reste prescrite pour cinq ans, mais, en statuant par ordonnance, le gouvernement ne pouvait qu’agir dans le cadre d’une loi d’habilitation qui ne portait pas sur ces autres droits. Il est donc nécessaire que législateur intervienne à nouveau sur ce point.

DOCUMENT 5 : Projet de loi PACTE, modifié par le Sénat, enregistré à la Présidence de FAssemblée nationale le 12 février 2019

Article 42 quinquies (nouveau)

I. —- Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° L’article L. 521-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 521-3. — L’action civile en contrefaçon se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l’exercer. » ;

2° Après l’article L. 521-3-1, il est inséré un article L. 521-3-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 521-3-2. — L’action en nullité d’un dessin ou modèle n’est soumise à aucun délai de prescription. » ;

3° L’article L. 615-8 est ainsi rédigé :

« Art. L. 615-8. — Les actions en contrefaçon prévues par la présente section sont prescrites par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l’exercer. » ;

4° Après le même article L. 615-8, il est inséré un article L. 615-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 615-8-1. — L’action en nullité d’un brevet n’est soumise à aucun délai de prescription. » ;

5° Au premier alinéa de l’article L. 622-7, après la référence : « L. 615-8 », est insérée la référence : « L. 615-8-1, » ;

6° L’article L. 623-29 est ainsi rédigé :

« Art. L. 623-29. — Les actions civiles prévues au présent chapitre, à l’exception de celle prévue à l’article L. 623-23-1, se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu où aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l’exercer. » ;

7° Après le même article L. 623-29, il est inséré un article L. 623-29-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 623-29-1. — L’action en nullité d’un certificat d’obtention végétale n’est soumise à aucun délai de prescription. » ;

8° Après l’article L. 714-3, il est inséré un article L. 714-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 714-3-1. — Sans préjudice du troisième alinéa de l’article L. 714-3 et de l’article L. 714- 4, l’action en nullité d’une marque n’est soumise à aucun délai de prescription. » ;

9° Le troisième alinéa de l’article L. 716-5 est complété par les mots : « à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaitre le dernier fait lui permettant de l’exercer ».

IL. — À la fin de l’article L. 152-2 du code de commerce, les mots : « des faits qui en sont la cause » sont remplacés par les mots : « du jour où le détenteur légitime du secret des affaires a connu où aurait dû connaître le dernier fait qui en est la cause ».

Il. — Les 2°, 4°, 5°, 7° et 8° du | du présent article s’appliquent aux titres en vigueur au jour de l’entrée en vigueur de la présente loi. Ils sont sans effet sur les décisions ayant force de chose jugée.

IV. — Les articles 12 et 13 et le || de l’article 23 de l’ordonnance n° 2018-341 du 9 mai 2018 relative au brevet européen à effet unitaire et à la juridiction unifiée du brevet sont abrogés.

DOCUMENT 6 : Arrêt de la Cour d’appel de Paris, pôle 5, ch. 6, 19 décembre 2018, n° 16/25325

Considérant qu’au cours de l’année 2008, Madame Isabelle BEAUJEAN, qui déclare exercer la profession de notaire, a décidé de procéder à une opération de défiscalisation se matérialisant par l’acquisition d’un bien immobilier à usage locatif ; que le 11 mars 2008, elle a signé, avec la société Capestel, un contrat de réservation portant sur l’acquisition d’un bien immobilier à construire faisant partie du programme de construction “Résidence Le Caribbea”, situé rue du Levant -Lieudit Espérance -92700 Fort de France ;

Considérant que pour financer cette acquisition d’un montant de 266 660 €, Madame BEAUJEAN a contracté un emprunt auprès de la société UCB, aux droits de laquelle vient BNP Paribas Personal Finance, qui lui a adressé une offre de prêt le 10 juin 2008 qu’elle a
acceptée le 22 juin 2008 ; que la signature du contrat de crédit dit “Helvet Immo” a été réitérée par acte authentique du 23 juillet 2008 ;

Considérant que le contrat de crédit est un prêt en francs suisses dont le remboursement des échéances s’effectue en euros ;

Considérant que par acte extrajudiciaire en date du 2 octobre 2014, Madame BEAUJEAN a assigné la banque devant le tribunal de grande instance de Paris ;

Considérant que c’est dans ces circonstances et conditions qu’est intervenu le jugement déféré qui a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de Madame BEAUJAN qui poursuivait, à titre principal, l’annulation de la stipulation d’intérêts conventionnels du contrat de prêt et, à titre subsidiaire, la déchéance de l’établissement de crédit de son droit aux intérêts, ainsi que l’indemnisation du préjudice qu’elle aurait subi du fait du manquement de ce dernier à ses obligations d’information, de loyauté et d’honnêteté ;

Considérant que Madame BEAUJEAN a conclu à l’infirmation du jugement en demandant que la cour examine au fond, notamment, ses demandes de prononcé de la nullité de la stipulation d’intérêts et, subsidiairement, de déchéance du droit aux intérêts conventionnels du prêteur et y fasse droït, puis, a sollicité la révocation de l’ordonnance de clôture intervenue afin de permettre aux parties de s’expliquer sur le caractère abusif des clauses contenues dans le contrat de prêt Helvet Immo ;

Considérant que par ordonnance du 16 octobre 2018, le magistrat de la mise en état a ordonné la révocation de l’ordonnance de clôture rendue le 11 septembre 2018 et invité les parties à conclure sur le caractère abusif ou non des clauses du contrat Helvet Immo :

(….)

Considérant qu’aucun texte, en droit français, ne prévoit l’imprescriptibilité de l’action tendant à voir réputée non écrite une clause qui serait abusive ;

Considérant qu’il résulte des écritures procédurales des parties et des pièces qu’elles versent au débats que le sujet est débattu et que la doctrine est partagée ;

Considérant que certes la cour de cassation, (3ème chambre) a jugé, en substance, que tout copropriétaire peut, sans que l’on puisse lui opposer la prescription, agir sur le fondement de l’article 43 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, pour faire modifier le règlement de copropriété quand il contient des clauses contraires aux dispositions des articles 6 à 17, 19 à 37 et 42 de la loi, lesquelles sont réputées non écrites, et étant non avenues par le seul effet de la loi, sont censées n’avoir jamais existé :

Considérant qu’elle a aussi (3ème chambre civile 10 juillèt 2013 12-14569 par exemple) jugé que la décision de réputer non écrite de telles clauses, contraires à des disposition légales, ne vaut que pour l’avenir et ne prend effet qu’à compter de la date à laquelle la décision a acquis l’autorité de la chose jugée ;

Considérant que la cour de cassation a également dans un arrêt (3ème civile 23 janvier 2008 06-19129), censuré les juges d’appel qui avaient déclaré non écrite une clause d’un bail commercial, au lieu de prononcer sa nullité, étant précisé qu’ainsi ils avaient évité de constater l’acquisition de la prescription ;

Considérant que cependant dans un tel cas, les deux contractants étaient deux professionnels qui connaissaient le statut d’ordre public qui avait vocation à se substituer à la clause illicite ;

Considérant que la transposition des jurisprudences précitées aux clauses abusives de l’article 132-1 du code de la consommation, devenu l’article L.212-1 du dit code, ne revêt aucun caractère d’évidence ;

Considérant qu’admettre que par une fiction juridique la clause abusive de l’article 132-1 du code de la consommation, devenu l’article L.212-1 du dit code, réputée non écrite, est censée n’avoir jamais existé, pose de sérieuses questions ;

Considérant en effet, tout d’abord, que pour qualifier une clause d’abusive au visa de ce texte, le juge ne doit pas examiner sa concordance avec des dispositions légales ou règlementaires précises, qu’il doit se livrer à une triple analyse et apprécier, d’abord, si la clause litigieuse porte sur la définition de l’objet principal du contrat ou sur l’adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert et ensuite si, dans le premier cas, elle est rédigée de façon claire et compréhensible : qu’en cas de réponse positive cumulative à ces deux questions, toute discussion à propos du caractère abusif de la clause est exclue ; que ce n’est qu’en cas de réponse négative que le juge doit dire si la dite clause a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;

Considérant, ensuite, que les conséquences de la décision du juge, qui déclare abusive, et donc non écrite, une clause d’un contrat, sont radicalement différentes, puisque la situation des parties doit être revue à la date de la conclusion du contrat et que tous les effets que la
dite clause a produits doivent être anéantis dans le passé ;

Considérant qu’il est dès lors manifeste qu’’autoriser un co-contractant à agir à tout moment, même si le contrat a été exécuté, pour soumettre à l’appréciation du juge le caractère abusif d’une clause d’un contrat et la voir déclarer non écrite, imposer au juge, d’agir d’office, et d’écarter une telle clause, sans limite de temps, ni sans aucune autre condition, constitueraient des atteintes réelles à l’ordre social qui ne peut admettre que des situations acquises soient remises en cause sans prévisibilité aucune, et dépendent d’aléas judiciaires;

Considérant que consacrer l’imprescriptibilité de cette action et la possibilité d’anéantir rétrospectivement les effets du contrat, de façon perpétuelle, créerait une insécurité juridique majeure ;

Considérant que le contrat est soumis, par sa date, aux dispositions de la loi n°208-561 du 17
juin 2008, entrée en vigueur le 19 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile

Considérant que cette loi a eu parmi ses objectifs essentiels, celui de raccourcir le temps et modifier la durée de la prescription jugée le plus souvent excessive, celui d’harmoniser les délais, et d’intégrer les enjeux européens pour rendre le système juridique français plus sécurisé, plus performant et attractif pour les opérateurs économiques et le droit contractuel plus attrayant aux yeux des investisseurs ;

Considérant qu’il y a lieu, notamment, de rappeler que les deux délais de prescription de l’action en nullité absolue et relative ont été unifiés, par cette loi, en un seul délai de 5 ans, de sorte qu’il n’existe plus, du point de vue du délai de la prescription, aucune différence entre l’ordre public de direction et l’ordre public de protection , et de souligner que les conséquences du prononcé de la nullité d’une clause et de la qualification de clause abusive sont identiques, puisque la clause nulle est réputée n’avoir jamais existé ;

(.)

Considérant qu’elle ne peut non plus invoquer la violation qui en découlerait pour elle de son droit à un recours effectif au juge, prévu par la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme ;

Considérant en effet que ce droit n’est pas absolu, qu’il se prête à certaines limitations et appelle une réglementation par l’État, jouissant à cet égard d’une certaine marge d’appréciation ; qu’en l’espèce le droit au tribunal de Madame BEAUJEAN ne se trouve pas atteint dans sa substance même ; que les délais de prescription, qui ne sont pas exagérément courts, poursuivent un but légitime, en ce que l’appréciation du délai à respecter pour former une demande vise à assurer une administration de la justice et le respect, en particulier, du
principe de la sécurité juridique ;

Considérant en définitive et compte tenu de ce qui précède, qu’il y a lieu de dire que l’action engagée par Madame BEAUJEAN pour voir déclarer non écrites des clauses qualifiées d’abusives relève du droit commun des contrats ; qu’elle est donc soumise, comme les
demandes, à la prescription quinquennale ; que le point de départ de cette prescription est la date de l’acceptation de l’offre, soit le 22 juin 2008 ; que Madame BÉAUJEAN a, pour la première fois, prétendu que les clauses de son offre de prêt étaient abusives, dans des
conclusions datées du 15 octobre 2018, c’est-à-dire postérieurement à l’expiration du délai de prescription intervenu le 23 juin 2014 ;

Considérant ainsi que la fin de non recevoir tirée de la prescription doit être accueillie et que les demandes formées par Madame BEAUJEAN doivent être déclarées irrecevables ;

DOCUMENT 7 : Extrait d’un article du journal « Courrier International », 30 octobre 2018, « Les agressions sexuelles sur mineurs bientôt imprescriptibles ? », relatant un article du journal madrilène El Pais

Actuellement, en Espagne, les délais de prescription en la matière commencent à courir à partir du moment où la victime atteint 18 ans. Les délits et crimes sexuels sur mineurs sont alors prescrits au bout de cinq à quinze ans, selon la gravité des cas. “Ce qui signifie que, au
maximum, le délit est prescrit quand la victime atteint l’âge de 33 ans, poursuit El Pais. Mais la majorité des victimes mettent des années pour assimiler les agressions et pour pouvoir les raconter, donc souvent les coupables ne sont pas inculpés.”

Le journal! rappelle que les débats sur la prescription n’existent pas seulement en Espagne, et
cite notamment le cas du Royaume-Uni, où l’imprescriptibilité existe déjà, et celui de la France “qui vient d’approuver une loi qui prolonge la prescription de vingt à trente ans”.

Mais cette future réforme est contestée par certains juristes. “Ils pensent qu’il est très compliqué de prouver des faits remontant à cinquante ans”, poursuit El Pais, et que cette modification du Code pénal ouvrirait la porte à d’autres exceptions, ce qui mettrait en cause le principe même de prescription, donc “l’idée que la responsabilité pénale a une limite temporelle”.

En conclusion, El Païis cite Borja Mapelli, professeur de droit pénal à l’université de Séville :

Pourquoi les agressions sexuelles sur mineurs et pas d’autres délits ? Ce serait une sorte de condamnation à perpétuité occulte.”

DOCUMENT 8 : Article 2227 du Code civil

Le droit de propriété est imprescriptible. Sous cette réserve, les actions réelles immobilières se prescrivent par trente ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

DOCUMENT 9 : Extraits de la décision du Conseil constitutionnel n° 98-408 DC du 22 janvier 1999

SUR LE CONTENU DE L’ENGAGEMENT INTERNATIONAL SOUMIS AU CONSEIL
CONSTITUTIONNEL :

1. Considérant que le traité, signé à Rome le 18 juillet 1998, porte création de la Cour pénale internationale et en définit le statut ; qu’il précise que cette Cour, de caractère permanent et dotée de la personnalité juridique internationale, peut exercer sa compétence à l’égard des crimes les plus graves, commis par des personnes physiques, qui touchent l’ensemble de la communauté internationale et qui, suivant les termes du préambule du traité, sont de nature à menacer ” la paix, la sécurité et le bien-être du monde “; que le traité indique que la Cour, qui peut exercer ses fonctions et ses pouvoirs sur le territoire des Etats parties, ” est complémentaire des juridictions criminelles nationales “; qu’il stipule que la Cour “est liée aux Nations Unies par un accord qui doit être approuvé par l’Assemblée des Etats parties au présent statut, puis conclu par le Président de la Cour au nom de celle-ci”; qu’il incombera à l’Assemblée des Etats parties d’adopter, à la majorité des deux tiers de ses membres, le règlement de procédure et de preuve la concernant ;

(-)

– SUR LE RESPECT DES PRINCIPES CONSTITUTIONNELS APPLICABLES AU DROIT PENAL ET À LA PROCEDURE PENALE :

18. Considérant qu’en application des dispositions de l’article 5, la Cour pénale internationale a compétence à l’égard du crime de génocide, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et du crime d’agression ; qu’elle ne pourra toutefois exercer effectivement sa
compétence à l’égard du crime d’agression que lorsque celui-ci aura été défini par un nouveau traité portant révision du statut, conformément aux articles 121 et 123 ;

19. Considérant que l’article 6 énumère les actes qui, ” commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial où religieux “, peuvent être retenus sous la qualification pénale de ” crime de génocide ” : que l’article 7 précise, quant à lui, les actes qui, ” commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre une population civile et en connaissance de cette attaque “, peuvent être qualifiés pénalement de ” crimes contre l’humanité ” ; qu’enfin, l’article 8 indique que la Cour a compétence à l’égard des” crimes de guerre “et en dresse la liste ; que figurent en particulier dans celle-ci les crimes qui ” s’inscrivent dans un plan ou une politique ou lorsqu’ils font partie d’une série de crimes analogues commis sur une grande échelle “;

20. Considérant qu’aux termes de l’article 29 du statut : “Les crimes relevant de la compétence de la Cour ne se prescrivent pas ” : qu’aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle, n’interdit l’imprescriptibilité des crimes les plus graves qui touchent
l’ensemble de la communauté internationale ;

DOCUMENT 10 : Décision du Conseil constitutionnel n° 2018-743 QPC du 26 octobre 2018

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 5 septembre 2018 par la Cour de cassation (première chambre civile, arrêt n° 904 du même jour), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a étéposée pour la société Brimo de Laroussilhe par Me Alain Bénabent, avocat au Conseil d’État e t à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2018-743 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006 relative à la partie législative du code général de la propriété des personnes publiques.

Au vu des textes suivants : la Constitution ;

l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

le code civil ; le code général de la propriété des personnes publiques ;

l’ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006 relative à la partie législative du code général de la propriété des personnes publiques, ratifiée par l’article 138 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du drait et d’allègement des procédures ;

le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Au vu des pièces suivantes :

les observations présentées pour la société requérante par Me Bénabent, enregistrées le 25 septembre 2018 ;

les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées les 27 septembre et 12 octobre 2018 ;

les pièces produites et jointes au dossier ;

Après avoir entendu Me Bénabent, pour la société requérante, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l’audience publique du 16 octobre 2018 ;

Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

L’article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 21 avril 2006 mentionnée ci-dessus, prévoit :« Les biens des personnes publiques mentionnées à l’article L. 1, qui relèvent du domaine public, sont
inaliénables et imprescriptibles ».

La société requérante reproche à ces dispositions de ne pas prévoir de dérogation aux principes d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité du domaine public en faveur des acquéreurs de bonne foi de biens mobiliers appartenant à ce domaine. En exposant ainsi ces acquéreurs, à
tout moment, à une action en revendication de ces biens par les personnes publiques, ces dispositions menaceraient la « sécurité des transactions ». || en résulterait une méconnaissance, d’une part, du droit à la protection des situations légalement acquises et à la préservation des effets pouvant légitimement être attendus de telles situations et, d’autre part, du droit au maintien des conventions légalement conclues.

Selon l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ».

Il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d’abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d’autres dispositions. Ce faisant, il ne saurait toutefois priver de garanties légales des exigences constitutionnelles. En particulier, il ne saurait, sans motif d’intérêt général suffisant, ni porter atteinte aux situations légalement acquises ni remettre en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations. De même, il ne respecterait pas les exigences résultant des articles 4 et 16 de la Déclaration de 1789 s’il portait aux contrats légalement conclus une atteinte qui ne soit justifiée par un tel motif.

Les dispositions contestées prévoient l’inaliénabilité et l’imprescriptibilité des biens, à caractère mobilier ou immobilier, appartenant au domaine public de l’État, des collectivités territoriales et de leurs groupements, et des établissements publics. En application de l’article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, le domaine public immobilier est constitué des biens appartenant aux personnes précitées qui sont soit affectés à l’usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu’en ce cas ils fassent l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public. Aux termes de l’article L. 2112-1 du même code, font partie du domaine public mobilier des mêmes personnes propriétaires les biens « présentant un intérêt public du point de vue de l’histoire, de l’art, de l’archéologie, de la science ou de la technique ». Afin d’assurer la protection du domaine public mobilier, les dispositions contestées dérogent à l’article 2276 du code civil relatif à la propriété des biens meubles relevant du droit commun, aux termes duquel « En fait de meubles, la possession vaut titre. – Néanmoins, celui qui a perdu ou auquel il a été volé une chose peut la
revendiquer pendant trois ans à compter du jour de la perte ou du vol, contre celui dans les mains duquel il la trouve ; sauf à celui-ci son recours contre celui duquel il la tient ».

L’inaliénabilité prévue par les dispositions contestées a pour conséquence d’interdire de se défaire d’un bien du domaine public, de manière volontaire ou non, à titre onéreux ou gratuit. L’imprescriptibilité fait obstacle, en outre, à ce qu’une personne publique puisse être dépossédée d’un bien de son domaine public du seul fait de sa détention prolongée par un tiers. Il résulte de ce qui précède, d’une part, qu’aucun droit de propriété sur un bien appartenant au domaine public ne peut être valablement constitué au profit de tiers et, d’autre part, qu’un tel bien ne peut faire l’objet d’une prescription acquisitive en application de l’article 2276 du code civil au profit de ses possesseurs successifs, même de bonne foi. Dès lors, les dispositions contestées ne portent pas atteinte à des situations légalement acquises, ni ne remettent en cause les effets qui pourraient légitimement être attendus de telles situations. Elles ne portent pas davantage atteinte aux conventions légalement conclues. Les griefs tirés de la méconnaissance des articles 4 et 16 de la Déclaration de 1789 doivent donc être écartés.

Par conséquent, les dispositions contestées, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er. – L’article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006 relative à la partie législative du code général de ia propriété des personnes publiques, est conforme à la Constitution.

Article 2. – Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 25 octobre 2018, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Jean-Jacques HYEST, Lionel JOSPIN, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et M. Michel PINAULT.

Rendu public le 26 octobre 2018.

DOCUMENT 11 : Extraits du Rapport dit « Savoy-Sarr », intitulé « La restitution du patrimoine culturel africain »

Le droit actuel qui s’oppose jusqu’ici aux demandes de restitutions repose sur le jeu croisé des dispositions du code du patrimoine et du code général des propriétés des personnes publiques (CG3P). Le code du patrimoine et le CG3P, adoptés par voie d’ordonnances respectivement en 2004 et 2006, ont produit une situation formellement plus verrouillée que précédemment, où la protection des collections de musées reposait essentiellement sur la jurisprudence. Le droit actuel pose une définition du domaine public mobilier englobant tous les biens culturels – notamment des collections publiques — générant une protection adossée aux règles d’imprescriptibilité et d’inaliénabilité du domaine public faisant de fait obstacle aux demandes de restitutions.

Ce blocage nous parait résulter d’une application stricte de la lettre des textes mais peu conforme à leur esprit. Les parlementaires ont à plusieurs reprises tenté de légiférer pour atténuer le caractère absolu de l’inaliénabilité des collections d’objets de musées, principal
obstacle aux restitutions.

(.)

Les rares cas de restitution des vingt dernières années n’ont été possibles que par des transactions avec les règles de la domanialité publique. Deux moyens ont été utilisés :

a. La solution la plus simple a été le recours à une loi d’exception, dérogeant aux textes applicables en matière de patrimoine et de domanialité publique. Ce procédé a été utilisé pour la restitution des « restes de la dépouille mortelle de la personne connue sous le nom de Saartjie Baartman », dite Vénus Hottentote, en 2002 (loi n°2002-323 du 6 mars 2002 relative à la restitution par la France de ia dépouille mortelle de Saartjie Baartman à l’Afrique du Sud), puis pour celle des « têtes maories conservées par des musées de France » en 2010 (loi no2010-501 du 18 mai 2010 visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories à la Nouvelle-Zélande et relative à la gestion des collections) ; il sera également utilisé prochainement pour le retour des crânes des résistants algériens à la colonisation.

Par sa visibilité et sa solennité — armée par le double principe de dignité et de respect dû aux morts —, il limite à l’extrême les cas de restitution.

Ces lois spéciales mettent en avant le caractère particulier des « restes humains » et la discussion sur leur appropriation, qui s’apprécie d’ailleurs de façon inégale : la jurisprudence a admis que les dispositions du code du patrimoine, qui rendent inaliénables les biens d’une
personne publique constituant une collection des musées de France, placent ces biens sous un régime de protection particulière, auquel ne fait pas obstacle le code civil, et notamment l’article 16-1 qui place hors commerce (exclusion de toute appropriation) le corps humain, ses éléments et ses produits.

Au-delà de cette jurisprudence, le respect dû aux morts corrélé à l’importance de ces restes humains, notamment pour leur communauté d’origine, a permis d’écarter, par voie législative et dans un consensus certain, l’application des procédures normales de déclassement du
domaine public, qui n’auraient d’ailleurs pu conduire qu’à un refus.

b. Le deuxième moyen est d’écarter l’application à l’objet considéré des textes sur le domaine public, au motif de sa non-appartenance à la collection du musée.

La non-appartenance peut être de fait.

On sait que les œuvres estampillées MNR (Musées Nationaux Récupération) depuis 1953, reliquat non restitué des 60 000 œuvres pillées par l’occupant nazi, n’ont jamais été intégrées aux collections publiques, afin précisément de permettre leur restitution une fois les propriétaires ou les ayants-droits identifiés ou reconnus. Dans une autre perspective, les restitutions de biens culturels chinois, opérées en 2015, ont été rendues possibles par le retrait, à la demande de l’Etat, du don fait quelques années auparavant par un collectionneur privé
au Musée Guimet. Dès lors, redevenus propriété privée, ces objets ont pu être restitués directement par le donateur à l’Etat chinois.

… Où résulter de la découverte d’un vice originel irréparable entachant l’acquisition :

Ainsi, les biens issus de trafics illicites qui seraient entrés dans les collections publiques postérieurement à 1997, par suite d’une négligence dans la vérification de la provenance lors de l’acquisition, ou dont le caractère illicite serait révélé du fait de la découverte d’éléments nouveaux, peuvent faire l’objet depuis la loi LCAP du 7 juillet 2016 d’une annulation par voie judiciaire de leur acquisition (par vente, don, ou legs) à l’initiative de la personne publique abusée.

L’objet étant ainsi réputé n’être jamais entré dans le domaine public, évitant ainsi la question du déclassement, l’article L. 124-1 nouveau du code du patrimoine prévoit que le juge peut ordonner sa restitution à son propriétaire d’origine.

Résonances avec la démarche de restitution du patrimoine africain

Ces procédures ou ces montages qui ont permis des restitutions ponctuelles ne pourraient répondre à la démarche de restitution, telle qu’elle s’est dessinée au long des diverses concertations conduites au cours de la mission »

(….)

Dans ces conditions, c’est dans le sens de la création d’une procédure entièrement nouvelle et spécifique que ce sont orientés les travaux de la mission, à l’issue de l’atelier juridique organisé le 26 juin 2018 (document 3) et de la concertation avec les directeurs de musées
organisée le 4 juillet 2018.

(…)

Cette procédure nouvelle prendrait place au Livre 1 du Code du patrimoine consacré aux « Dispositions communes à l’ensemble du patrimoine culturel », dans le chapitre 2 du Titre 1, où serait insérée une section 5 relative à la restitution de biens culturels sur le fondement d’un accord bilatéral de coopération culturelle avec des pays anciennement colonies, protectorats ou gérés sur mandat français (voir la proposition législative, présentée sous forme de tableau, en annexe au présent rapport, document 2).

Elle est entreprise sur la base de la demande formelle du pays demandeur, qui pourra être déposée rapidement pour les objets dont l’origine et les conditions d’acquisition sont suffisamment connues pour que l’établissement du dossier d’instruction ne nécessite pas de
travaux de recherches. Pendant la durée de validité de l’accord de coopération, renouvelable selon la volonté des Parties, d’autres demandes pourront porter sur une (des) liste(s) d’objets dont l’intérêt et la provenance auront été étudiés dans le cadre des partenariats de recherche prévus par le(s) programme(s) d’action triennaux (voir infra : b) L’accord de coopération).

La commission paritaire d’experts désignés par les deux Etats parties, dont la composition et les missions sont fixées par chaque accord de coopération, évalue les dossiers d’instruction des objets de la liste qui lui sont soumis. Pour formuler son avis, elle apprécie les éléments relatifs à la provenance des objets et, si les conditions de l’acquisition initiale ne peuvent être clairement établies, leur complémentarité avec d’autres objets restitués ou leur intérêt pour le pays ou la communauté d’origine.

()

L’accord de coopération culturelle, conclu entre la France et chaque pays demandeur, dont un modèle-type, à adapter au cas par cas, figure en annexe au présent rapport (document 2), a pour socle l’objectif de restitution définitive.

Dans ce but, l’accord de coopération culturelle prévoit, entre autres mesures, l’établissement ou l’achèvement de l’inventaire des objets en provenance du pays africain contractant, la définition de programmes de recherches partenariales triennaux, renouvelables, pour
déterminer la provenance des objets dont on ne connait pas actuellement les conditions d’acquisition initiale, la création d’une commission paritaire d’experts désignés par les deux pays pour examiner les demandes des restitutions, des modalités de coopération culturelle et scientifique sur le long terme ainsi que des actions de formation de professionnels et de sensibilisation du public, la désignation d’un comité de suivi de l’ensemble de ces actions.

DOCUMENT 12 : Extraits (sans notes de bas de page) de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme — Grande chambre 17 maï 2010, n° 36376/04, Kononov c/ Lettonie,

accompagnés de l’opinion concordante commune aux juges Rozakis, Tulkens, Spielmann et Jebens

A l’origine de l’affaire se trouve une requête (n° 36376/04) dirigée contre la République de
Lettonie et dont un ressortissant de la Fédération de Russie, M. Vassili Kononov (« le
requérant »), a saisi la Cour le 27 août 2004 en vertu de l’article 34 de la Convention de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Le requérant a été représenté par Me M. loffe, avocat exerçant à Riga. Le gouvernement letton (« le gouvernement défendeur » ou « le Gouvernement») a été représenté par son agent, Mme |. Reine. Le gouvernement de la Fédération de Russie, qui a exercé son droit
d’intervention conformément à l’article 36 $ 1 de la Convention, l’a été par le représentant de la Fédération de Russie auprès de la Cour, M. G. Matiouchkine.

3. Le requérant alléguait en particulier que la condamnation pour crimes de guerre qu’il avait subie pour avoir participé à une expédition militaire le 27 mai 1944 était contraire à l’article 7 de la Convention.

(.)

143. Invoquant l’article 7 de la Convention, le requérant se plaint d’avoir fait l’objet d’une application rétroactive du droit pénal. Il plaide que les actes pour lesquels il a été condamné n’étaient pas constitutifs d’une infraction au moment de leur commission en 1944 et que le
paragraphe 2 de l’article 7 n’était pas applicable, les faits incriminés étant selon lui étrangers au champ d’application de cette disposition. L’article 7 de la Convention énonce :

« 1. Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d’après le droit national ou international. De même il n’est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicabie au moment où l’infraction a été commise.

2. Le présent article ne portera pas atteinte au jugement et à la punition d’une personne coupable d’une action ou d’une omission qui, au moment où elle a été commise, était criminelle d’après les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées. »

(.)

231. Toutefois, en 1944, le droit international était silencieux en la matière. Dans aucune déclaration internationale antérieure sur la responsabilité pour crimes de guerre et l’obligation de les poursuivre et de les réprimer il n’avait été prévu de délais de prescription. Si l’article II $ 5 de la loi n° 10 du Conseil de contrôle traitait la question relativement aux crimes de guerre commis sur le territoire allemand avant et pendant la Deuxième Guerre mondiale, les Statuts des TMI de Nuremberg et de Tokyo, la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide, les Conventions de Genève de 1949 et les Principes de Nuremberg ne prévoyaient rien concernant la prescriptibilité des crimes de guerre (comme le confirme le préambule de la Convention de 1968).

232. La question essentielle devant être tranchée par la Cour est donc de savoir si, à quelque moment que ce soit avant l’engagement des poursuites contre le requérant, pareilles poursuites devaient être réputées prescrites en vertu du droit international. Il ressort du paragraphe précédent qu’en 1944 aucun délai de prescription n’était fixé par le droit international relativement à la poursuite des crimes de guerre, et dans son évolution postérieure à 1944 le droit international n’a jamais comporté de normes en vertu desquelles les crimes de guerre reprochés au requérant auraient été prescrits.

233. En résumé, la Cour estime, premièrement, qu’aucune des dispositions du droit interne relatives à la prescription n’était applicable (paragraphe 230 ci-dessus) et, deuxièmement, que les accusations portées contre le requérant n’ont jamais été prescrites en vertu du droit
international (paragraphe 232 ci-dessus). Elle conclut donc que les poursuites dirigées contre le requérant n’étaient pas prescrites.

OPINION CONCORDANTE COMMUNE AUX JUGES ROZAKIS, TULKENS, SPIELMANN ET JEBENS

1. Si nous suivons pleinement la majorité lorsqu’elle estime que les griefs du requérant ne peuvent pas donner lieu à un constat de violation de l’article 7 de la Convention, il est un point particulier de son raisonnement auquel nous ne pouvons souscrire : celui relatif à sa conclusion au sujet de l’argument du gouvernement de la Fédération de Russie suivant lequel il faudrait voir dans les poursuites dirigées contre l’intéressé une application rétroactive du droit pénal.

2. En effet, le gouvernement de la Fédération de Russie, partie intervenante dans la présente affaire, considérait que, compte tenu du délai de prescription maximum prévu par l’article 14 du code pénal de 1926, les poursuites contre le requérant étaient prescrites au moins depuis 1954. 11 notait que le requérant avait été condamné sur le fondement de l’article 68 $ 3 du code pénal de 1961 et que l’article 6 $ 1 de ce code énonçait que les crimes de guerre, entre autres, étaient imprescriptibles. Dès lors, il soutenait, tout comme l’intéressé, que les poursuites intentées contre le requérant s’analysaient en une extension ex post facto du délai de prescription qui aurait été applicable au niveau national en 1944 et, par conséquent, en une application rétroactive du droit pénal (paragraphes 228 et 229 de l’arrêt).

3. La réponse de la Cour est donnée dans les paragraphes 230 et 233 de l’arrêt qui expliquent, en substance, que ce n’est pas le code pénal de 1926 (qui intégrait une disposition relative à la prescriptibilité) qui aurait constitué le fondement de la responsabilité du requérant en 1944 si l’intéressé avait été poursuivi pour crimes de guerre en Lettonie en 1944. S’appuyant sur la manière dont le code en question était libellé, la Cour indique que « des poursuites pour crimes de guerre au niveau national en 1944 auraient exigé le recours au droit international, non seulement pour la définition de ces crimes, mais également pour la détermination du délai de prescription applicable ». Toutefois, elle poursuit ainsi : « en 1944, le droit international était silencieux en la matière. Dans aucune déclaration internationale antérieure sur la responsabilité pour crimes de guerre et l’obligation de les poursuivre et de les réprimer il n’avait été prévu de délais de prescription (..) les Statuts des TMI de Nuremberg et de Tokyo, la Convention de 1948 sur le génocide, les Conventions de Genève de 1949 et les Principes de Nuremberg ne prévoyaient rien concernant la prescriptibilité des crimes de guerre (comme le confirme le préambule de la Convention de 1968) ». L’absence de toute évocation de la question de la prescriptibilité dans les instruments adoptés après la guerre amène la Cour à conclure que les crimes commis par le requérant étaient imprescriptibles en vertu du droit
international, qui était silencieux en la matière : en 1944 aucun délai de prescription n’était fixé par le droit international relativement à la poursuite des crimes de guerre et, dans son évolution postérieure à 1944, le droit international n’a jamais comporté de normes en vertu desquelles les crimes de guerre reprochés au requérant auraient été prescrits.

4. À notre sens, la réponse donnée par la Cour sur ce point particulier n’est pas la bonne. Le simple silence du droit international ne suffit pas à prouver que le consentement et les intentions de la communauté internationale en 1944 étaient claires relativement à l’imprescriptibilité des crimes de guerre, en particulier si l’on tient compte du fait qu’avant Nuremberg et Tokyo l’état du droit pénal international concernant la responsabilité individuelle pour crimes de guerre n’avait pas encore atteint un degré de sophistication et d’exhaustivité permettant de conclure que les questions techniques et procédurales relatives à l’application de ce droit avaient été clairement tranchées. En substance, on pourrait dire qu’en 1944 le droit international général — appréhendé comme une combinaison des accords internationaux généraux existants et de la pratique des Etats — avait résolu la question de la responsabilité individuelle (et pas seulement celle de la responsabilité des Etats), et que ce n’est qu’après la guerre que furent précisées les questions procédurales, telles que celle de la prescriptibilité des crimes de guerre.

DOCUMENT 13 : Arrêt de la Cour de cassation, première chambre civile, 7 octobre 2015, n° de pourvoi : 14-14.702

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 28 janvier 2014), que Mmes Chantal et Nadia X…ont été inscrites sur les registres de l’état civil comme nées en France d’Holga X…, de nationalité allemande, respectivement les 27 janvier 1957 et 22 juillet 1964 ; que, le 8 mars 20712, elles ont assigné Mme Y…, veuve de Mohand Y.., décédé le 18 février 2010, et ses quatre filles, Mmes Ouerdia, Anissa, Dalida et Saïda YŸ…(les consorts Ÿ…) pour faire juger que Mohand Y…était leur père ; que le tribunal a déclaré la loi allemande applicable et ordonné avant dire droit une expertise biologique ; C2)
Sur le second moyen :

Attendu que les consorts Y…font grief à l’arrêt de dire que Mohand Y…est le père de Mmes Chantal et Nadia X..alors, selon lé moyen, qu’est contraire à l’ordre public international français la loi qui déclare imprescriptible l’action en recherche de paternité ; qu’en l’espèce, les consorts Y.…faisaient régulièrement valoir dans leurs conclusions d’appel que la loi allemande, déclarant imprescriptible l’action en recherche de paternité, devait être écartée par le juge français comme contraire à l’ordre public international français ; que la cour d’appel a cru pouvoir appliquer la loi allemande en soulignant que l’action avait été introduite dans le délai de l’article 330 du code civil français, soit dans les dix ans suivant le décès du père prétendu : qu’en retenant, pour juger que l’action en recherche de paternité fondée sur la loi allemande, de nature imprescriptible, ne portait pas atteinte à l’ordre public international français, que l’action avait été intentée dans le délai de l’article 330 du code civil, quand ce délai ne concerne pourtant que l’établissement de la filiation paternelle par la possession d’état, que ne connaît pas le droit allemand, la cour d’appel, qui aurait dû comparer avec le délai de prescription
français de l’article 321 du code civil, en cas d’action en recherche de paternité, a statué par un motif inopérant, privant sa décision de base légale au regard de l’article 3 du code civil ;

Mais attendu qu’ayant, à bon droit, mis en œuvre la loi allemande, désignée par la règle de conflit de l’article 311-14 du code civil français, qui rattache l’établissement de la filiation à la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de l’enfant, et relevé que, si l’article 1600 d du code civil allemand ne soumettait pas l’exercice de l’action en constatation judiciaire de paternité à un délai de prescription, à la différence du droit français, cette circonstance était à elle seule insuffisante à caractériser une contrariété à l’ordre public international français conduisant à l’éviction de la loi étrangère, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

DOCUMENT 14: Observations de Monsieur Ghislain Poissonnier, sous Tribunal d’instance de Montluçon, 4 juillet 2018, Recueil Dalloz 2018, p. 1485 Selon une offre de crédit du 18 septembre 2012, la SA Financo accorde à un consommateur un crédit accessoire à l’achat de panneaux photovoltaïques de 12 700 € remboursables en 120 mensualités de 159,06 €, au taux annuel de 7,20 %. Le 2 mars 2018, la SA Financo assigne le consommateur devant le tribunal d’instance de Montluçon en sollicitant sa condamnation à lui payer 11 791 € au taux conventionnel. L’emprunteur n’a réglé que 2 645 € depuis 2012 (soit 16,6 mensualités), mais l’action du prêteur n’est pas pour autant forclose, puisque le consommateur a bénéficié d’une procédure de surendettement. Le juge d’instance relève d’office l’absence de la fiche d’informations précontractuelles (art. L. 312-12 c. consom.). La SA Financo indique qu’en signant l’offre de crédit, le débiteur a reconnu être en possession de cette fiche. Faisant application de la jurisprudence européenne (CJUE 18 déc. 2014, aff. C-449/13, D. 2015. 715, note G. Poissonnier), le juge d’instance écarte la clause- type de reconnaissance de réception de la fiche et note que le prêteur ne justifie pas du contenu de la fiche. Le prêteur est donc déchu des intérêts et l’emprunteur condamné au paiement de la seule somme de 10 075 €, sans intérêt pour l’avenir afin d’assurer le caractère effectif et dissuasif de la sanction prononcée (CJUE 27 mars 2014, aff. C-565/12, D. 2014. 1307, note G. Poissonnier).

Voilà donc une affaire classique de crédit à la consommation. Toutefois, celle-ci prend un tour particulier, en ce que la SA Financo oppose à l’initiative du juge la prescription quinquennale (art. L. 110-4 c. com.). Elle estime que le relevé d’office en mai 2018 du moyen d’irrégularité du contrat tiré de l’absence de fiche d’informations précontractuelles est prescrit s’agissant d’une offre conclue en septembre 2012.

Le raisonnement est osé et est généralement rejeté par les tribunaux d’instance et les cours d’appel, mais il a gagné en crédibilité depuis que certains juges d’appel l’ont retenu (Paris, pôle 4, ch. 9, 11 janv. 2018, n° 16/12948, D. 2018. 238, obs. G. Poissonnier) et qu’un auteur l’a défendu en doctrine (B. Maumont, Le relevé d’office à l’épreuve de la prescription, JCP E 2018. 1260). Il vise à « recycler » une ancienne jurisprudence de la Cour de cassation qui opposait au juge le délai biennal de forclusion (Civ. Îre, 3 janv. 1996, n° 94-04.022 et 9 déc. 1997, n° 96-04.172), en la transposant au délai quinquennal de prescription, mais en « oubliant » les
 nombreuses évolutions législatives et européennes intervenues depuis.

Le tribunal d’instance de Montluçon écarte le raisonnement avancé en s’appuyant sur cinq arguments principaux :

1° Toutes les causes de la déchéance du droit aux intérêts, même lorsqu’elles sont soulevées par le juge, relèvent du régime de la défense au fond dès lors qu’elles ont pour effet d’aboutir à ce que les demandes formulées puissent être rejetées, même partiellement, après examen au fond du droit. Or une défense au fond (art. 71 c. pr. civ.) échappe à la prescription (Civ. îre, 31 janv. 2018, n° 16-24.092, D. 2018. 292).

2° La prescription ne s’applique qu’aux parties du litige et non au juge. En effet, ce dernier, lorsqu’il relève un moyen de droit, ne présente aucune demande, mais prend une initiative visant à faire respecter la loi qui ne peut pas être déclarée « irrecevable ».

3° Le point de départ du délai d’une éventuelle prescription opposable au juge ne pourrait être fixé qu’au moment où le juge prend connaissance du contrat irrégulier (lors du dépôt des pièces jointes à l’assignation ? à l’audience ?), et non au moment de la signature du contrat.

4° La loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 qui a été adoptée pour reconnaître au juge le pouvoir de relever d’office des moyens de droit en droit de la consommation n’a enfermé ce pouvoir dans aucun délai.

5° La compensation par une initiative du juge d’une situation d’inégalité du consommateur par rapport au professionnel est nécessaire au regard des objectifs visés par les directives européennes protégeant les consommateurs (CJUE 21 avr. 2016, aff. C-377/14, D. 2016.
1744, note H. Aubry ; 16 nov. 2016, aff. C-42/15).

Tous ces arguments sont convaincants, même si le premier vient plus au soutien de la recevabilité des moyens de l’emprunteur que de l’office du juge ; en effet, celui-ci n’oppose pas une défense au fond, mais se contente de trancher le litige conformément aux règles de
droit qui lui sont applicables. C’est ce que relève le quatrième argument, qui nous semble particulièrement pertinent. Le texte autorisant le relevé d’office en droit de la consommation (art. R. 632-1 c. consom.) ne prévoit aucune limitation temporelle dans l’exercice du pouvoir reconnu au juge. C’est un texte spécial, qui déroge aux règles générales fixées par le code de procédure civile et le code civil et l’emporte donc sur celles-ci. Les règles processuelles relatives à la prescription ne peuvent être utilisées pour paralyser ce texte, sauf à considérer que les textes spéciaux n’ont plus de justification dans des branches spécifiques du droit (ici, le droit de la consommation). Quant à l’article L. 110-4 du code de commerce, il est parfaitement compatible avec l’article R. 632-1 du même code, le premier concernant le délai dans lequel les parties au litige peuvent agir {les affaires de consommation, compte tenu de leur nature et de leur montant, ne devant pas rester trop longtemps « vivantes ») et le second concernant l’office du juge (dont les contours ne peuvent être affectés par une durée quelconque, la mission du juge au service de la loi étant permanente).

Un sixième argument, tiré de la Convention européenne, aurait pu être mentionné. Pierre-Yves Gautier écrivait ainsi, à propos du relevé d’office des moyens de droit : « Pour ne pas quitter les droits fondamentaux, c’est une illustration notable du procès équitable que celle du juge qui supplée, lorsque l’occasion lui paraît propice, la faiblesse ou l’ignorance d’une partie » (BICC 15 janv. 2004, p. 7). Le droit à un procès équitable ne se périme pas au bout de cinq ans…

DOCUMENT 15 : Extraits (sans notes de bas de page) de l’étude de Monsieur Laurent Griffon-Yarza, Prescription pénale – Aspects pratiques de la réforme de la prescription pénale, Droit pénal n° 5, Mai 2017, dossier 2

1. La réforme du droit commun de la prescription pénale
A. – La refonte de la prescription de l’action publique

1.- La loi allonge les délais de prescription et consacre nombre de règles jurisprudentielles relatives au point de départ, à l’interruption et à la suspension du délai de prescription.

2. – S’agissant de la durée, le changement est majeur : les délais de prescription de l’action publique de droit commun sont doublés et passent de 10 à 20 ans en matière criminelle (CPP, art. 7, al. 1), et de 3 à 6 ans en matière délictuelle (CPP, art. 8, al. 1), le délai de prescription d’un an en matière contraventionnelle étant maintenu (CPP, art. 9) ; le délai de 6 ans est également applicable aux délits douaniers (C. douanes, art. 351, al. 1 modifié), la prescription des contraventions douanières étant maintenue à 3 ans (al. 2). Cela va mécaniquement augmenter de façon considérable le stock des procédures pénales en cours dans les parquets, et aussi le nombre de dossiers pour lesquels l’action publique va être mise en mouvement, et ce sans étude d’impact ni moyens supplémentaires.

(..)

2. Les régimes dérogatoires de prescription
A. – La prescription de l’action publique

10. – La plupart des régimes dérogatoires de prescription de l’action publique ne sont pas modifiés, qu’ils soient liés à la nature de l’infraction où à la minorité de la victime.

11. – Pour ce qui est de la nature de l’infraction, trois régimes dérogatoires existent. D’abord, la loi maintient l’imprescriptibilité des seuls crimes contre l’humanité (CPP, art. 7, al. 3), l’article
213-5 du Code pénal étant abrogé. Ensuite, le délai dérogatoire de 30 ans de prescription à compter de la commission de l’infraction (CPP, art. 7, al. 2) demeure inchangé pour les crimes contre l’espèce humaine (C. pén., art. 214-1 à 214-4), le crime de disparition forcée (C. pén., art. 221-12), les crimes terroristes (CPP, art. 706-16), les crimes de trafic de stupéfiants (CPP, art. 706-26), les crimes de guerre (C. pén., Livre IV bis) et les crimes relatifs à la prolifération d’armes de destruction massive (CPP, art. 706-167), entraînant l’abrogation des articles 215- 4, 221-18, 462-10 du Code pénal, et 706-25-1, 706-31, al. 1 et 706-175 du Code de procédure pénale. Enfin, en matière correctionnelle, le délai dérogatoire de 20 ans à compter de la commission de l’infraction (CPP, art. 8, al. 4) n’est pas modifié pour les délits de trafic de stupéfiants (CPP, art. 706-26), les délits terroristes (CPP, art. 706-16, sauf les infractions de provocation ou d’apologie de terrorisme ou de consultation de sites terroristes des articles 421- 2-5 à 421-2-5-2 du Code pénal}, les délits punis de 10 ans d’emprisonnement relatifs à la prolifération d’armes de destruction massive (CPP, art. 706-167) et les délits de guerre (C. pén., Livre IV bis).

(.)

C. – La prescription des infractions occultes et dissimulées

18. – C’est un système tout à fait original et à deux étages qui est mis en œuvre. En matière d’infractions occultes ou dissimulées, le législateur a consacré la jurisprudence hostile et contra legem prévoyant, pour certains délits, le report du point de départ du délai de
prescription de l’action publique au jour de leur découverte, et il l’a généralisée en la rendant applicable à l’ensemble des infractions, crimes, délits ou contraventions, y compris celles pour lesquelles la Cour de cassation a refusé de différer le point de départ de la prescription, comme par exemple pour les délits de faux ou de violation de secret professionnel. Ainsi, pour éviter que des faits ne soient prescrits avant même leur découverte, « le délai de prescription de l’action publique de l’infraction occulte ou dissimulée court à compter du jour où l’infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l’exercice de l’action publique » (CPP, art. 9-1, al. 3). Ces infractions sont désormais définies : « Est occulte l’infraction qui, en raison de ses éléments constitutifs, ne peut être connue ni de la victime ni de l’autorité judiciaire » (CPP, art. 9-1, al. 4) ; et « Est dissimulée l’infraction
dont l’auteur accomplit délibérément toute manœuvre caractérisée tendant à en empêcher la découverte » (CPP, art. 9-1, al. 5), étant précisé qu’une infraction peut être à la fois occulte et dissimulée. À n’en pas douter, le champ des infractions dissimulées sera plus étendu que celui qui avait été délimité par la chambre criminelle, qui pourrait également étendre le nombre des infractions occultes par nature.

19. – En contrepoids à la généralisation du champ des infractions clandestines et pour éviter leur imprescriptibilité de fait, la loi institue des délais butoirs, un report du point de départ de la prescription, ou plutôt un délai de prescription puisque l’article 9-1, alinéa 3 in fine, du Code de procédure pénale, l’évoque expressément : « sans toutefois que le délai de prescription puisse excéder douze années révolues pour les délits et trente années révolues pour les crimes à compter du jour où l’infraction a été commise ». Dès lors, si, avant l’expiration d’un délai de 12 ou 30 ans à compter de sa commission, un délit ou un crime occulte ou dissimulé n’a pas été découvert et n’a pas fait l’objet d’un acte interruptif de prescription, les faits seront définitivement prescrits et ne pourront plus donner lieu à poursuite. Par contre, si un acte interruptif intervient avant l’expiration de ces délais, les délais de prescription de droit commun de 6 ans et de 20 ans s’appliquent.

DOCUMENT 16 : Motion sur la réforme de la prescription pénale, L’Union des Jeunes Avocats de Paris, le 23 novembre 2016

MOTION SUR LA REFORME DE LA PRESCRIPTION PENALE

L’Union des Jeunes Avocats de PARIS, réunie en commission permanente, le 23 novembre 2016: Connaissance prise des dispositions de « la proposition de loi portant réforme de la prescription pénale »,

RAPPELLE le caractère cardinal de la prescription et l’impérieuse nécessité de rendre une décision de justice dans un délai raisonnable,

DENONCE le fait que ladite proposition conduit à remettre en cause la prescription de l’action publique en ce qu’elle prévoit : le doublement des délais de prescription pour les crimes et les délits ; une définition large de ses causes interruptives et suspensives ;

la généralisation des reports de prescription en matière d’infractions occultes ou dissimulées. DEPLORE que le législateur mésestime l’impact de l’écoulement du temps sur : le dépérissement des preuves matérielles, la fragilisation des témoignages et des souvenirs
des plaignants ; l’affaiblissement des moyens de défense, Lesquels aggraveraient lès risques en matière d’erreur judiciaire.

DENONCE le fait que les modifications proposées entretiennent les victimes dans l’espoir chimérique d’une décision de justice qui les satisfasse,

SOULIGNE en outre le risque d’encombrement supplémentaire des Juridictions.

CONDAMNE donc en toutes ses dispositions la proposition de réforme de la prescription pénale.

DOCUMENT 17 : Extraits (sans notes de bas de page) de l’ouvrage de Madame Michèle- Laure Rassat, Traité de procédure pénale, 3° éd., 2001, n° 297

Un principe juridique de bon sens veut que le non-usage d’un droit pendant un certain temps éteigne celui-ci. Une infraction est prescrite quand un certain délai s’est écoulé depuis sa commission sans qu’elle ait été poursuivie. La prescription est le mode normal d’extinction
pour les infractions que le ministère public a décidé de classer sans suites. Mais elle peut jouer aussi pour les infractions que le ministère public souhaitait poursuivre mais contre lesquelles il n’a pas agi avec assez de zèle.

N° 297. FONDEMENTS DE LA PRESCRIPTION. La prescription est toujours, quand elle existe (elle est inconnue des doits anglo-saxons) une institution très discutée. Les arguments échancés sont classiques.

1/ En faveur de la prescription on constate qu’il n’est pas utile d’agiter l’opinion publique en lui rappelant, des infractions anciennes et qu’elle a oubliées. On observe d’autre part qu’il est inopportun de manifester aussi spectaculairement l’inefficacité d’un système pénal qui met des années avant de se saisir des délinquants. Enfin, dans le cadre d’une espèce de contrat social qu’est la poursuite pénale on considère qu’il est légitime que la négligence des autorités publiques chargées de la lutte contre la délinquance soit sanctionnée.

Dans l’optique de la politique pénale on allègue la sanction indirecte qu’a constitué pour le délinquant la crainte d’être découvert et le fait que s’il n’a pas été pris c’est qu’il n’a commis de nouvelles infractions ce qui joue comme une espèce de sursis.

Enfin, et d’un point de vue technique, on note la difficulté qu’il y aurait à poursuivre des infractions anciennes qui ont disparu où sont devenues incertaines.

2! Les adversaires de la prescription n’ont que des arguments de politique pénale mais ils sont puissants. IIS retournent d’abord celui de leurs adversaires en notant que l’absence de poursuite des premières infractions d’un individu a pu le renforcer dans un sentiment
d’impunité et l’inciter, au contraire, à en commettre de nouvelles. Dans la perspective actuelle du traitement plutôt que de la répression de la délinquance, l’absence de poursuite a empêché d’appliquer tout de suite à l’intéressé les mesures qui auraient été propres à le détourner de la délinquance. Enfin et l’argument est considérable, l’institution de la prescription a pour effet de favoriser plus que les autres les délinquants les plus dangereux parce qu’ils vivent dans des réseaux assez organisés pour leur fournir des moyens d’échapper aux recherches.

3/ Bilan. En l’état actuel des choses, on peut considérer que l’état majoritaire de l’opinion pénaliste, mais non la nôtre, est défavorable à la prescription. Certains auteurs et les positions jurisprudentielles dominantes, quoique désordonnées, s’emploient à en réduire l’efficacité par des moyens divers.

DOCUMENT 18 : Extraits de l’ouvrage de Beccaria, Des délits et des peines, 1764, Traduit par M. Chaillou de Lisy

Il faut, au reste, bien se garder de prétendre établir une proportion exacte entre l’atrocité des délits et le temps fixé par la durée des informations ou la prescription. Lorsqu’un crime n’est pas prouvé, plus il est affreux, moins il est vraisemblable. || sera donc nécessaire d’abréger le temps des informations et de prolonger celui qu’on exige pour que la prescription ait lieu, malgré la contradiction apparente qu’implique ce principe avec celui que je viens d’établir, en avançant que si l’on considère le temps de la prison et celui de la prescription.

Comme une peine, on peut décerner des châtiments égaux à des crimes différents. Développons cette idée, et, pour la rendre plus sensible, divisons les crimes en deux classes, la première sera celle des atrocités, qui commencera à l’homicide et comprendra toute l’horrible progression des forfaits. Nous rangerons dans la seconde les actions moins coupables dans leur principe et moins funestes dans leurs effets. Cette distinction a sa source dans la nature de l’homme. La sûreté de la personne est de droit naturel, la sûreté des biens
est de droit social. Les sentiments de l’humanité sont gravés par la nature dans toutes les âmes : il faut de bien puissants motifs pour étouffer leur voix impérieuse, et ces motifs sont en petit nombre. Il n’en est pas de même de ceux qui nous portent à violer les conventions de la société. Le droit qui résulte de ces conventions n’est point écrit dans notre cœur, et la pente naturelle à chercher son bien-être ne conduit que trop souvent à y donner atteinte. Or, si l’on veut établir des règles de probabilité pour ces deux classes de délit, il faut les poser sur des bases différentes. Les grands crimes étant plus rares, la durée de l’instruction doit être diminuée, et celle qu’on fixe pour la prescription augmentée en raison de la vraisemblance qu’il y a que l’accusé est innocent. Par ce moyen, qui accélère la sentence définitive, on évite de laisser au peuple l’espérance de l’impunité, toujours plus dangereuse à mesure que les forfaits sont plus atroces ; au contraire, dans les délits moins considérables, la durée de l’instruction doit être prolongée, parce que l’innocence de l’accusé est moins probable, et le temps fixé pour la prescription doit être raccourci, parce que les suites de l’impunité sont moins funestes ; au reste, cette distinction ne serait pas admissible si les dangers de l’impunité diminuaient eu proportion exacte de ce que la probabilité du délit est plus forte, si l’accusé devait d’autant plus se flatter d’échapper à la justice qu’il y a plus de raisons de le croire coupable ; mais qu’on y réfléchisse avec soin, et l’on verra qu’un accusé, renvoyé faute de preuves, n’est ni absous ni condamné, qu’il peut, par conséquent, être arrêté de nouveau et soumis à l’examen juridique pour le même crime, et qu’enfin il est toujours sous les yeux vigilants des lois, et n’est nullement déchargé de l’accusation intentée contre lui qu’après avoir parcouru l’espace de temps fixé pour la prescription relativement au délit dont il était soupçonné. Tel est, ce me semble, le tempérament qu’on doit prendre pour assurer à la fois la sûreté des citoyens et leur liberté sans favoriser l’une aux dépens de l’autre. Ces deux biens forment le patrimoine égal et inaliénable de chaque citoyen ; et, par les moyens que je propose, on ne les verra plus protégés, l’un par le despotisme découvert ou déguisé, l’autre par l’anarchie tumultueuse.

DOCUMENT 19 : Proposition de loi n° 230, 27 septembre 2007, résumé, Dalloz actualité 10 octobre 2007

Les députés UMP Marc Le Fur et Franck Gilard ont déposé, à l’Assemblée nationale, une proposition de loi afin de rendre imprescriptibles les crimes sexuels commis sur des mineurs.

Le texte, enregistré à la présidence de l’Assemblée le 27 septembre dernier, vise à instaurer un régime de prescription pour les crimes sexuels commis sur des mineurs identique à celui existant en matière de crimes contre l’humanité. L’action publique et la peine deviendraient imprescriptibles. Cette proposition qui offre une nouvelle modification des règles de la prescription (Rép. pén. Dalloz, v° Prescription) en faveur des mineurs victimes d’infractions sexuelles graves, s’inscrit dans le prolongement du dispositif déjà protecteur issu des lois de 1998 et 2004. Ainsi, depuis la loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles et à la protection des mineurs , pour les crimes, et pour certains délits commis contre des mineurs, la prescription ne commence à courir qu’à compter de la majorité de ces derniers (L. n° 98-468, D. 1998.209 ; C. Guéry, La prescription des infractions contre les mineurs : un nouvel état des lieux, D. 1999. 38 }).

DOCUMENT 20 : Arrêt de la Cour de cassation, troisième chambre civile, 12 octobre 2011, n° de pourvoi : 11-40.055

Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité transmise par arrêt du 25 mars 2011 de la cour d’appel de Saint-Denis dans le litige opposant les consorts X… à Mme Y.. ;

Attendu que les consorts X.. soutiennent que les articles 2258 et 2272 du code civil et l’interprétation jurisprudentielle qui en est faite, portent atteinte aux articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, en ce qu’ils privent le légitime
propriétaire d’un immeuble de son droit de propriété sans juste et préalable indemnité et sans qu’aucune nécessité publique ne l’impose ;

Mais attendu, d’une part, que la question ne portant pas sur l’interprétation d’une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n’aurait pas eu l’occasion de faire application, n’est pas nouvelle ;

Et attendu, d’autre part, que la question posée ne présente pas un caractère sérieux dès lors que la prescription acquisitive n’a ni pour objet ni pour effet de priver une personne de son droit de propriété ou d’en limiter l’ exercice mais confère au possesseur, sous certaines
conditions, et par l’écoulement du temps, un titre de propriété correspondant à la situation de fait qui n’a pas été contestée dans un certain délai ; que cette institution répond à un motif d’intérêt général de sécurité juridique en faisant correspondre le droit de propriété à une
situation de fait durable, caractérisée par une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire ; D’où il suit qu’il n’y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de
constitutionnalité ;

DOCUMENT 21 : Observations de Monsieur Remy Libchaber (extraits), sous Cour de cassation, Chambre commerciale, 6 juin 2018, n° 17-10.103, Revue des contrats 2018, p. 548 (sans notes de bas de page)

La décision rendue le 6 juin 2018 est assurément de grand principe, quoiqu’il soit difficile d’en fixer l’’exacte portée. Dans un arrêt promis à un vaste rayonnement, la chambre commerciale exprime de façon précise le domaine d’intervention de la prescription, d’ailleurs peu après que la première chambre civile l’avait fait. Elle dit ainsi pour droit que la prescription est sans incidence sur les défenses au fond, ce qui transparaissait dans diverses décisions sans jamais avoir été formalisé avec une pareille netteté. L’idée d’une prescription jouant à sens unique, applicable aux demandes mais non aux défenses, ne faisait pas partie du contenu canonique de l’enseignement, mais était parfois affirmée en passant. Il s’agit donc d’une nouveauté, qui paraîtra néanmoins étrangement familière aux juristes, comme s’ils l’avaient toujours connue de façon flottante. En effet, le contenu de l’arrêt rappellera aux amateurs de droit romain l’adage célèbre qui a trouvé son lieu d’épanouissement dans l’exception de nullité : quæ temporalia sunt ad agendum, perpetua sunt ad excipiendum. Mais l’adage s’était trouvé cantonné à ce seul domaine dont il ne parvenait pas à sortir, au lieu que l’affirmation de la Cour est non seulement investie d’une portée supérieure, mais destinée à un avenir plus favorable puisqu’elle a pu toucher naguère la disproportion dans le cautionnement, et aujourd’hui la déchéance du droit aux intérêts dans cette même sûreté.

(..)

Les faits de l’espèce étaient simples. En 2004, une banque avait consenti une ouverture de crédit à une entreprise, opération confortée par un cautionnement solidaire convenu avec un particulier. Cette entreprise se trouva mise en redressement avant d’être liquidée, et la banque se retourna légitimement en paiement contre la caution. Cette dernière ne contesta pas le principe de son engagement contractuel, mais objecta qu’elle n’était pas débitrice des intérêts du crédit en raison de l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier. Aux termes de cette disposition, sous peine de déchéance du droit aux intérêts, il appartient au prêteur pour chaque année et avant le 31 mars, de « faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation bénéficiant de la caution » —, ce que la banque s’était abstenue de faire avec constance. C’est pourquoi, dans ses écritures judiciaires de novembre 2014, la caution refusa de payer des intérêts dont le montant n’avait jamais été porté à sa connaissance par le préteur.

La banque n’essaya pas de contester ses manquements, mais entreprit de discuter leurs conséquences juridiques. Selon elle, la déchéance ne se produisait pas de plein droit mais devait être invoquée par la caution désireuse d’en profiter. Suivie par la cour d’appel de
Limoges, elle estimait de façon contre-intuitive que les intérêts étaient effectivement dus pour toutes les années où la caution n’avait pas fait valoir ses défaillances, si bien qu’il ne pouvait y avoir de déchéance qu’à partir de l’invocation qu’elle en avait faite, et pour les 5 années qui la précédaient à raison de la prescription. De ce raisonnement subtil, il résultait que la déchéance ne jouait pas pour le passé antérieur aux dernières 5 années, si bien que les intérêts de la dette étaient dus par la caution jusqu’à 2008. En revanche, pour les 5 années courant de 2008 à 2014, ils devaient faire l’objet d’une remise en vertu de la déchéance de l’article L. 313-22. La Cour de cassation ne se laissa pas prendre à ce raisonnement spécieux, ce qui la conduisit à casser la décision sur ce point : « la prétention de M. X fondée sur le défaut d’information annuelle de la caution, laquelle tendait seulement au rejet de la demande en paiement des intérêts au taux contractuel formée par la banque à son encontre, constituait un moyen de défense au fond, sur lequel la prescription est sans incidence ».

(…)

Le commentaire doit discuter la portée de l’arrêt rendu en ce qu’il a affirmé que la prescription pouvait être opposée à une demande en justice, sans pouvoir trouver aucune place dans une défense au fond. Pour l’intelligence de la solution, cette « défense » doit être entendue de la façon la plus stricte : c’est de la seule défense au fond qu’il est question, celle de l’article 71 du Code de procédure civile qui se limite à objecter à la demande sans rien ajouter. La règle nouvellement posée serait en effet dénuée de toute portée dans le cas d’une demande reconventionnelle qui associe à l’objection une demande nouvelle, en tant que telle exposée à la prescription.

On a déjà proposé une explication simple qui justifie l’affirmation de la Cour. Une demande en justice est toujours fondée sur un droit subjectif, dont le demandeur sollicite l’exercice : il doit en conséquence établir la réunion des conditions de mise en œuvre de la règle qu’il invoque ; et, au-delà du présupposé, il doit être sensible au respect du délai prévu pour l’action. En revanche, dans sa réponse, le défendeur au fond ne se prévaut d’aucun droit subjectif rival : il se borne à montrer qu’en réalité, les conditions nécessaires à l’action ne se trouvaient pas réunies ou que le demandeur avait excédé le délai mis à sa disposition par la loi. Se limitant à la contestation du présupposé d’un droit d’action — c’est-à-dire à la dénégation des conditions nécessaires au droit subjectif ou de ses exigences processuelles de mise en œuvre —, le défendeur ne se trouve in fine confronté qu’à l’établissement d’éléments de fait insensibles au
temps passé. L’exercice des droits se paralyse avec l’écoulement du temps : telle est la vocation de la prescription, destinée à éviter qu’une menace judiciaire plane trop longtemps sur un éventuel défendeur. En sens inverse, la possibilité de rapporter en défense la preuve des éléments de fait justifiant l’action se trouve à l’abri de la durée : elle demeure inentamée et donc efficace quel que soit le moment où elle est envisagée. C’est ce qui justifie l’affirmation de la Cour : Dans une défense au fond qui n’articule aucune demande nouvelle, il ne peut pas être question d’une paralysie due à la prescription.